Gilgamesh 4 / Session 14: les Anges Brises

Ruche Gilgamesh, 12ème district, 727eme jour de la contre-attaque impériale

L’odeur de l’ozone… La puanteur de la mort…

Une sensation sur sa joue : le chaud et le froid. Le froid de la pierre et du métal, mais le chaud ? Un liquide épais à la senteur métallique, du sang ?

Péniblement, Samil ouvrit les yeux, reprenant conscience du monde qui l’entourait avec douleur. Depuis combien de temps était-il la, à même le sol, au milieu des cadavres de ceux qui avaient été ses frères d’armes ? Prenant appui sur les débris et les morceaux de corps, il parvint à se redresser suffisamment pour s’asseoir contre un tas de gravats. Il était perclus de crampes et couvert de contusions mais, bizarrement, indemne. D’un geste las, il essuya sa joue, retirant le sang qui la recouvrait, ce sang qui n’était pas le sien. Plusieurs minutes passèrent alors qu’il palpait chaque centimètre carré de son corps, incapable de croire à ce qui lui arrivait… Il avait survécu…
Il tenta de se relever, mais l’effort était encore trop grand pour lui et ses jambes se dérobèrent. Il allait devoir attendre pour tenter à nouveau sa chance et s’extraire vers les lignes impériales, si ces dernières existaient encore. Observant son environnement immédiat, il avisa une gourde encore accrochée au ceinturon d’un caporal, ainsi qu’un havresac contenant quelques barres nutritives. L’homme n’en n’aurait plus besoin : sa tête avait du être arrachée par un obus et ses intestins crevés débordaient des plaies béantes de son abdomen. La puanteur était immonde, mélange de sang et d’excréments. Samil récupéra son maigre butin et rampa précautionneusement vers un autre abri, près de la carcasse d’une Chimère qui semblait avoir encaissé au moins une vingtaine de tirs de canon laser. Il se hissa, non sans difficultés, dans le compartiment transport du char : ici, il serait à l’abri quelques heures et pourrait retrouver un semblant de forces. S’installant tant que bien que mal, il trouva quelque réconfort dans ce qu’il avait trouvé. L’eau était croupie et les barres aussi dures que du plastacier mais cela lui semblait le meilleur repas auquel il ait eu droit depuis des lustres.

Ayant recouvré un semblant d’énergie, Samil se senti assez revigoré pour tenter de se rappeler ce qu’il s’était passé. Comment en était-on arrivé là ?

Deux divisions complètes des nouvelles FdP, vingt-mille hommes, plus de mille chars et canons automoteurs, auxquels il fallait ajouter deux compagnies de Space Marines, six mille Skitarii et une Maisonnée de Chevaliers venus de Metallica, Ryza et Mars. En face ? Les Renseignements avaient indiqués quelques milliers d’humains hérétiques, de l’artillerie et des blindés, peut-être une centaine d’Astartes, mais rien qui n’aurait pu arrêter la furia des forces impériales. Le plan de bataille, expliqué par les officiers, était simple : percer les lignes ennemies et faire exploser le verrou autour de la Cathédrale, bifurquer vers la section orientale des anciennes fortifications pour atteindre la Gare de Triage et les anciens Arsenaux et faire la jonction avec les Dark Angels présents dans ce secteur. D’autres offensives étaient prévues sur d’autres points de la ligne de front mais l’objectif était clair : briser le dispositif des traitres et les chasser vers les secteurs périphériques de la Ruche.

Le barrage d’artillerie préliminaire avait été long et intense. Pendant quatre heures, les Basilisks, Medusae, Gorgones et autres Manticores avaient pilonné les positions chaotiques sans relâche. A peine le dernier canon s’était-il tu que les compagnies blindées et motorisées gilgameshii s’étaient élancées à l’assaut, s’écrasant contre la première ligne de cultistes, dispersée sans effort en quelques minutes. La seconde ligne, à peine remise du choc, n’offrit guère plus de résistance. L’assaut se transforma en ruée vers l’avant, vers une victoire qui semblait toute acquise… C’est alors qu’explosa la première mine et que l’enfer se déchaîna. Les explosions se succédèrent, complétées par des pièges et des effondrements de terrain. Les chars de tête furent vite arrêtés, réduits à l’état d’épaves ou empêtrés dans les embouteillages, ils furent vite dépassés par l’infanterie qui avait abandonné ses transports pour poursuivre l’offensive et progresser sous une grêle de bolts, de lasers et d’obus, alors que des formations d’humains vendus aux Dieux Noirs contre-attaquaient. La ruée ralentit puis s’arrêta lorsque les fantassins finirent par se mettre en défensive. Les vagues de cultistes et de gardes corrompus, même appuyées par des véhicules se brisèrent contre les serviteurs de l’Empereur jusqu’à ce que les forces de l’Adeptus Mechanicus interviennent et reprennent la marche en avant. Les pertes étaient effroyables, mais les troisième et quatrième lignes furent franchies à leur tour. A ce stade, la compagnie de Samil avait perdu un tiers de ses effectifs et ce dernier avait pris la tête de son peloton.

Caché dans sa Chimère, Samil repensa aux minutes qui suivirent. Mécaniquement, il regarda sa montre. Cette dernière était brisée mais s’il se fiait à elle, cela était arrivé cinquante-deux minutes après le début de l’offensive, peu de temps après que les guerriers de métal avaient déclenché leur riposte.

La cinquième ligne de défense devait être le tombeau des Impériaux…

Tout était allé tres vite, trop vite. Samil se souvenait de la ligne de Vindicators et de Rapières, des bunkers hérissés de canons. Il avait entendu un cri « Cœur de Fer ! Main de Fer ! », avant que les premières explosions retentissent. En quelques secondes, le fer de lance avait été anéanti, les escouades disloquées alors que toute coordination s’envolait. Il s’était jeté à terre, comme il l’avait appris à l’entrainement. Des cadavres désarticulés étaient projetés en tous sens, les blindes explosaient, transpercés par les impacts multiples des canons laser ou broyés par les obus lourds. Il revit l’image de Thorval, se vidant de son sang par la plaie béante qui avait succédé a son bras gauche, appelant vainement des renforts au moyen d’une radio brisée en deux… Des hurlements partout, des cris, des appels à l’aide, alors que la Garde mourrait. Puis une grande clameur et le pas pesant de machines s’avançant vers eux : l’ennemi venait pour la curée. Marcheurs aux facies démoniaques, monstruosités aux membres multiples ou simples guerriers vêtus d’acier et brandissant des armes impies, les Iron Warriors brisèrent les derniers ilots de résistance, et l’espoir avec eux…